Le Conseil national de la refondation consacré au Logement, qui se tient aujourd’hui et qui rassemble les acteurs de la construction, a pour objectif de proposer des solutions concrètes pour que le logement ne devienne pas la bombe sociale et écologique de demain, comme l’a compris Olivier Klein. Si l’exercice d’écoute et de dialogue est nécessaire, il est essentiel qu’il ne se résume pas à un énième diagnostic des maux et des tensions que nous partageons tous.
Le logement reste le premier poste de dépenses des ménages, une préoccupation majeure des Français et l’achat de toute une vie pour beaucoup d’entre eux. Mais voilà : le défi de loger tous nos concitoyens, dignement et décemment, et là où les besoins existent, reste non seulement d’actualité mais surtout de plus en plus prégnant. Relever ce défi, celui du logement pour tous, passe d’abord par le refus d’opposer les logements entre eux. De fait, le logement privé et sa filière de promotion, sont aujourd’hui les principaux producteurs du logement intermédiaire comme du logement social, du logement des propriétaires comme de celui des locataires, des personnes aisées comme des plus fragiles.
Face à l’urgence sociale, nous ne pourrons réussir qu’ensemble. L’Union sacrée du monde du Logement évoquée par le Ministre de la Ville et du Logement est possible, mais elle ne restera qu’une formule, si toute la chaîne de la fabrication de la ville n’est pas valorisée et encouragée.
Il faut mobiliser le foncier avec volontarisme, et d’abord le foncier public, celui de l’Etat, pour permettre de construire des logements dans les territoires les plus tendus, à des prix accessibles et même abordables, qui facilitent des parcours résidentiels locaux et évitent les mécanismes d’éviction par les prix qui prévalent aujourd’hui dans les zones denses. Car comment comprendre que la rétention foncière soit aujourd’hui plus avantageuse sur le plan fiscal que sa cession et sa transformation?
Evidemment, il importe de soutenir les collectivités afin que celles-ci retrouvent un intérêt à construire obéré par la raréfaction de leurs ressources ces dernières années. Les maires bâtisseurs doivent bénéficier d’aides dédiées et importantes, pour restaurer leurs capacités d’investissement et d’exploitation d’équipements publics. Aujourd’hui, plus un maire construit, plus ça lui coûte ! N’est-il pas temps d’inverser cela ?
Les dispositifs fiscaux dédiés à l’investissement locatif ont, eux aussi, besoin de pérennité. A fortiori dans la conjoncture actuelle, qui peut nier que la prévisibilité est un facteur de confiance économique décisif pour les acteurs du secteur, et l’utilité sociale absolue des logements produits via ces dispositifs pour tous les habitants ?
Par ailleurs, il est urgent que les règles qui fixent l’ambition écologique deviennent une opportunité, et non un frein, à l’acte de construire. Être au rendez-vous du Zéro Artificialisation Nette ou de la Règlementation environnementale RE 2020, demande de la confiance, de la vigilance et la lucidité de tous sur les conditions nécessaires à leur réussite.
N’allons pas trop vite ! Si nous ne respectons pas ensemble, maîtres d’ouvrage publics et privés, la progressivité des jalons réglementaires 2025, 2028, 2031 de la RE, les industries et les filières de construction n’auront pas le temps de s’organiser et les prix des logements s’en trouveront lourdement enchéris.
Non, la règlementation ne doit pas organiser la convergence exclusive vers un matériau unique de construction, le bois, qui présente certes des avantages mais aussi le défaut de ne pas avoir d’inertie et pour la question du confort d’été, et aussi de restreindre la créativité, la liberté et l’esthétique architecturales qui font aimer la ville, et de pénaliser certaines filières de construction locales. Au risque, aussi, de standardiser la ville de demain, ce que personne ne souhaite.
Non, les normes administratives ne peuvent plus être incohérentes entre elles, au point que les services d’incendie nous demandent d’encapsuler les immeubles de structure bois, au prix de perdre leur légèreté carbone initialement visée.
Non, nous ne pouvons pas calculer l’empreinte carbone des bâtiments sur un cycle de vie limité sans distinction à 50 ans ! Cela condamne des bâtiments plus lourds, mais dont la vie peut être beaucoup plus longue car réversible, comme les bâtiments d’Haussmann ou d’Eiffel.
Il est temps d’encourager et d’organiser l’effort de tous les acteurs au service d’une ville belle, vertueuse, inclusive, au service de tous. Une ville choisie et non subie, réconciliée avec les Françaises et les Français. Alors d’accord pour que le Conseil National de la refondation consacré au logement en soit le déclencheur, mais l’urgence est là et les mesures attendues.